Un métier en devenir
Toujours au Royaume-Uni, Chappell, l’un des plus grands éditeurs de chansons, lance en 1941 sa collection de production music : The Chappell Recorded Music Library. Par un jeu d’acquisitions successives, ce département sera d’abord acquis dans les années 80 par Zomba Production Music, qui en poursuivra le développement, avant d’être intégré à BMG Production Music en 2003, et enfin à Universal Publishing Production Music en 2007. Il ne faut pas confondre Chappell Recorded Music Library avec Warner-Chappell Production Music, actuel département de Warner Brothers Music. C’est à juste raison que le Royaume-Uni peut être considéré comme le berceau de la production music où, aujourd’hui encore, plus d’une centaine de d’éditeurs sont actifs.
Aux Etats-Unis, Capitol Records lance à la fin des années 40 sa collection Capitol Transcription Service qui précédera Capitol ‘Q’ series et Hi-Q.
« The Guild-Universal Library » est créée par le Service Radiophonique des Forces Armées Américaines. Elle est dirigée par le compositeur et éditeur d’origine hongroise, Alexander Laszlo, l’un des pionniers de la production music moderne. Il est en effet le premier à avoir théorisé, en s’inspirant de l’architecture, le sens et la fonction de différentes séquences musicales par rapport à l’image dans la seconde librairie qu’il sera amené à créer : « Structural Music ». Voir le site ‘Mood Music – Composers, arrangers, publishers.
A cette même époque, la compagnie formée par Emil Ascher et Thomas J. Valentino représente des sociétés européennes, principalement britanniques, et devient un des acteurs majeurs du secteur aux USA.
Dans le courant des années 40 et 50, de nombreuses séries américaines font appel aux librairies musicales, et ce malgré le conflit survenu avec la puissante Musician’s Union, qui interdisait à ses membres de travailler pour les sociétés de production music. Ce type de conflit se reproduira au Royaume-Uni, pourtant berceau de l’activité, dans le courant des années 60. Les éditeurs britanniques seront donc amenés à enregistrer à l’étranger pour passer outre l’opposition de L’Union des Musiciens. Ce n’est qu’en 1978 que les sociétés de production music britanniques signeront une convention avec l’Union des Musiciens, simplifiant ainsi les procédures d’enregistrement et permettant l’éclosion de toute une industrie créatrice.
Après la seconde guerre mondiale, c’est au Royaume-Uni et en France que, ce qui allait devenir la production music, devient l’objet de recherches grâce à l’importance prise par le théâtre radiophonique, les émissions scientifiques, et plus encore les séries de science-fiction pour la radio.
De 1944 à 1963, le célèbre compositeur Henri Dutilleux (1916 – 2013) est responsable du Service de l’Illustration Musicale de la Radiotélévision Française (RTF). Ce service permet à de nombreux musiciens de renom d’écrire des œuvres de commandes pour les émissions radiophoniques.
A la fin des années 40, Pierre Schaeffer crée le Groupe de Musique Concrète, puis le Groupe de Recherche Musicale dont l’un des buts était de concevoir des applications pour l’illustration musicale de programmes radiophoniques, puis pour la télévision naissante. La musique de la série animée, les Shadocks, écrite par Robert Cohen-Solal, reste une référence de ce qu’il était convenu d’appeler « musique d’application ».
Les expérimentations du GRM (Groupe de Recherche Musicale) ont donné l’impulsion à la musique électro-acoustique, permettant à des créateurs tels que Pierre Henry et Bernard Parmegiani de concevoir un art nouveau. Les recherches du GRM ont en outre donné naissance à la technique du sillon fermé ; en quelque sorte l’utilisation de boucles, et donc de sampling avant l’heure. Selon diverses sources, cette technique inspirera les minimalistes américains que sont Philip Glass, Steve Reich et Terry Riley, et de manière plus certaine, de nombreuses écoles de l’electro contemporaine.
C’est dans un même esprit de découverte qu’est créé en 1958 le BBC Radiophonic Workshop sous la direction de Desmond Briscoe.